Fable du Loup et de l'Agneau (XIIème siècle) Par Marie de France, traduit littéralement en prose.
Ésope dit ceci du loup et de l'agneau, qui buvait à un ruisseau :
Le loup à la source buvait, et l'agneau en aval était.
Avec colère parla le loup qui était très querelleur.
Par mauvaise humeur il lui parla : « Tu m'as, dit-il, fait grand ennui. »
L'agneau lui à répondu : « Sire, et en quoi ? »
« Donc, ne le vois-tu? Tu m'as ici troublé cette eau : je n'en puis boire mon soûl. Aussi, je m'en irai, je crois,
comme je vins, tout mourant de soif.»
L'agnelet donc répond : « Sire, déjà vous buvez en amont : de vous me vient tout ce que j'ai bu ».
« Quoi ! » fit le loup « m'outrages-tu ? »
L'agneau répond : « Je n'en ai intention ».
Le loup lui dit : « Je sais de vrai ; cela même me fit ton père, à cette source où j'étais avec lui, maintenant il y a six mois, comme je crois ».
« Qu'en retirez-vous, fit-il, sur moi ? Je n'étais pas né, comme je crois. »
« Et cela est parce que cela est », lui a dit le loup,
« Maintenant me fais-tu contrariété ? C’est chose que tu ne dois pas faire. »
Donc le loup prit le petit agneau, l'étrangle avec ses dents, et le tue.
Ainsi font les riches voleurs, les vicomtes et les juges, de ceux qu'ils ont en leur justice.
Faux prétextes par convoitise, ils trouvent assez pour les confondre, souvent ils font comparaître à leurs plaids, la chair ils leur enlèvent et la peau, comme le loup fit à l'agneau.
L'habit ne fait pas le moine |
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